mercredi 29 mars 2006

Gatorade


J’ai souscri à un abonnement au club voisin, comme lorsque j’étais au pays, car j’aime la gym en salle ; attention, je préfère être claire : c’est pas du sport. Moi ce que j’aime c’est suer sang et eaux sur une musique rythmée et sans mélodie ni poésie ni subtilité, jeter aux murs et aux miroirs mon besoin de gigoter, mon envie irraisonnée de remuer, mes restes d’enfance qui me poussait à faire la toupie, pour m’étourdir et me saoûler ; aujourd’hui c’est pareil je retrouve ces sensations grâce à une désinhibition soudaine et totale (étrangement contractée dans le vestiaire pendant l’échange de la panoplie de ville pour le fitnesswear) qui me permettent de perdre toute dignité en même temps que teint frais et tenue. Je me résorbe entièrement dans mes mouvements, dans la musique et la sueur, dans l’enchaînement, et au mieux, car on n’atteint pas toujours ce nirvana, dans la satisfaction de sentir où ça coince. Ça ressemble à la satisfaction éprouvée lorsque je déniche la crasse derrière les pieds du lavabo pour mieux l’éradiquer ; je deviens alors championne du monde, grisée par le pouvoir, je suis pas chirurgien du miracle ou défenseur de l’opprimé, pas non plus révolutionnaire, mais à mon échelle j’ai fait beaucoup aujourd’hui : j’ai coincé mon gras, ma raideur et mes toxines, et je leur ai dit deux mots entre quatre yeux. L’apogée de cette satisfaction se fait attendre dans un suspens long de 24h, et n’est réellement atteinte que si au réveil suivant les muscles qui ne se souvenaient plus qu’ils habitaient là, me font durement sentir qu’ils ont réintégrés leur fonction première et abandonné l’idée de rester à coincer la bulle entre l’os et les nerfs, par une grève douloureuse qui fait de chaque geste familier tel celui de descendre un escaliers une mini séance de torture pendant laquelle chaque tentative de minimiser le mal par une restriction de mouvement n’est qu’un échelon de plus sur l’échelle du ridicule.
Aujourd’hui donc, je suis le cours de « slim jog » , dont l’intitulé suit la réthorique habituelle consistant à introduire un peu de poésie dans un monde de biscotos. Souvenons nous des délicieux Body shaper, Super forme, Total sculpting beauty.
Madame la professeur est souriante et s’entraîne face à la glace quand j’arrive. Je vérifie la coutume des baskets échue à ce milieu, et pour être sûre de la qualité de mes compagnes à panthère, puisque je ne comprends goutte à ce qu’elle me dit (si ce n’est qu’elle emploie la forme interrogative), elle se courbe et tâte mes petons et j’ai un peu honte d’en arriver là.
Le cours commence alors que nous ne sommes que quatre, et nul retardataire ne viendra grossir la ligne que nous formons face au miroirs. Il y a deux femmes en forme, aux épaules fines et sculptées et une mamie. La prof a des zygomatiques d’acier, elle est méga en forme, elle s’agite et vérifie son sourire qui ne la quitte pas, malgré son rythme effréné, malgré ces paroles qu’elle hurle dans le micro, et malgré la sueur qui lui coule. Elle dispose de tout un matos de chef op. de Broadway, et règle au millimètre l’ambiance sonore et visuelle. Elle ne change jamais de titre pour changer de cadence mais accélère juste, comme je le faisais pour rire quand je tournais le bouton sur 45t alors que le 33 était de rigueur sur mon tourne disque coccinelle (ah on rigolait bien !).
Les tubes sont un peu racornis par les ibiziens de l’avant-avant-avant(ter) dernière génération, c’est-à-dire que même la mère de famille que je suis les a largement entendus, et je suis déçue qu’il n’y ai pas de la fraîche J-Pop mixée au programme.
La prof me matte, elle serait aveugle de ne pas voir la gaijin en jaune qui s’agite en vain et loupe un pas sur deux. J’ai une excuse, je comprends pas un mot, et au lieu d’appréhender les mouvements quand elle les annonce, je ne peux que les suivre quand elle les effectue ; de ce point de vue je suis pas si perdue, mais je fais trublion dans la troupe bien huilée qu’elles forment. Là ou ça se corse, inévitablement, c’est quand je me félicite d’un enchaînement à peu près maîtrisé et qu’ intervient un dernier chassé-croisé-syncopé qui ruine ma concentration ; les trois autres élèves sont impecs, même la mamie est pile dans le « move it, move it » avec ses petits bras et ses demis mambos.
Il faut savoir que la technique ici pour fondre un maximum est de monter le chauffage à chaque début de cours, et quand je dis monter, c’est pousser le chauffage à fond qu’il faut comprendre. Ce qui fait que même quand on ne force pas, on se retrouve liquide, avec l’envie d’une bonne douche et l’illusion d’en avoir bavé, surtout du dos.
Je m’essouffle en pas chassés, bâcle mes demis tours pour reprendre le train en marche, me prends au jeu de l’accélération de la choré’ qui rend fou, « maintenant à gauche! », je ne comprends pas les mots mais ce vieux truc de la symétrie est la dernière astuce des profs de sport pour faire monter la pression à 10mn des étirements, histoire de souder tout le monde dans un accomplissement unique, précis et répété qui nous feraient frères, liant la connivence à la compétition, qui sera le maillon?, qui pourra soutenir la cadence jusqu’au bout?, et nous faire croire avant les regards fuyant des douches (on n’a quand même pas gardé les cochons ensemble), que nous sommes des pros du fitness, et ce point commun nous hypnotise au miroir bien plus que notre propre reflet de dents serrées et de regards accérés mais vides, car la conscience s’est perdue quelque part entre « qu’est-ce que je fais après ? », « faut que je m’achète un nouveau lycra » , et le feed back de soirées d’été dans la boîte du mois d‘aôut, l’âme enfin tranquille qui en profite pour boire un martini sur le sofa puisqu’on ne lui demande rien (pour une fois).

Et bien ici, on ne se regarde pas, on ne partage rien de tout cela. Je quitte les relations humaines quelques instants, pour ne rester qu’un corps et libérer mes neurones afin qu’ils puissent gambader. Les douches sont individuelles, brûlantes et fournies en produits qui moussent, et les cabines d‘habillage, de vraies loges de star du jambon. Je reviendrais, c’est sur, avec un lycra neuf et aussi un vanity bien fourni.

mardi 28 mars 2006

Le Japon n'a pas de futur

Oui c'est vrai et c'est purement incroyable. N'imaginez pas un instant que je parle là du déclin démographique de ce beau pays, du fait que les générations ne se renouvellent pas et que faute d'immigration massive ce pays ne comptera plus que des retraités dans quelques années. Je ne parle pas évidemment du taux record de 0,4 enfants par femme à Tokyo et de ses conséquences sur le nombre de crèches et de magasins de puériculture ou de jouets. Notez enfin que n'aborderais pas non plus les innombrables conséquences socio-économiques de ce tassement de la pyramide des âges. Non.

Non, ce que je veux dire c'est que le Japon n'a pas de futur dans sa langue. Les verbes ne se conjuguent pas au futur en Japonais. Et encore pas plus tard que ce matin, je ne le savais pas.

On ne peut pas dire en Japonais : " demain j'irais manifester contre le CPE".
Par contre on peut dire : "demain je mange un bento, allongé sous un cerisier en fleur".

De même, on ne peut absolument pas traduire correctement la phrase "dans une semaine je serais délégué syndical". Non, il faut se contenter de "dans une semaine je suis délégué syndical".

Enfin un petit tour à la bibliothèque de Yoyogi uehara ou les cocottes ont eut tout le loisir de lire les aventures de BA-BA-PA-PA sans futur et moi de dévorer le dèrnier numéro de gentil caniche mignon magazine au présent et au passé.

Juste avant de vous coucher ne manquez pas cette petite vidéo qui fait tant rire madame ga..

dimanche 26 mars 2006

Le printemps dans la tête du délégué CGT...

Le printemps est arrivé au Japon (déconne?) et les cerisiers sont en fleurs. Quand la bas, ce sont les coups de triques de la maréchaussée qui fleurissent sur les fronts encagoulés des étudiants et des délegués syndicaux, ici ce sont ces milliers de bourgeons rosés qui s'épanouissent au soleil.

Alors on se prend a réver. On imagine que, lorsque l'on passe devant le Donky de Shibuya, la jeune employée qui s'époumonne dans son mégaphone à vanter les mérites du nouveau modèle de portable ne se mette soudain à hurler, " Villepin, ta réforme si tu savais ou on se la met!!" (je pense personellement que c'est à son cul qu'ils pensent? non?) On imagine que les manifestants Japonais qui manifestent en rang par deux et en silence se mettent soudain a jeter des poubelles en galva contre la vitrine du Chanel de Omote Sando ou renversent un camion de yakitori. Et la on mesure la distance qui sépare Paris de Tokyo.

On imagine enfin un délégué CGT en costume cravate de salary man se rendant à son bureau de Shinjuku.

Puis on oublie vite tout ca, on referme Libération, et on attaque le bento du printemps, allongé dans l'herbe fine du Shinjuku gyoen, en regardant les Sakura en fleurs et la horde de pépé-san et leurs appareils photo sur pied essayer de capter leur beauté fugace.


Puis, parce que décidemment on aime beaucoup ça, on passe le dimanche à Kichijoji à faire du pédalo-cygne et à se balader avec Yo.


Ces deux la m'ont fait penser à Mistery train de Jim Jarmusch.

vendredi 24 mars 2006

jeudi 23 mars 2006

Pierre Richard en vélo


Une fois n'est pas coutume, je vais m'humilier sur la place publique. A Tokyo je possède un vélo. Un VTT a 58 vitesses pour être plus précis, puisque Tokyo est largement fourni en petites côtes de plus de 20 % de déclivité et que Garance s'approche des 20 kg, ce fut un choix audacieux. D'habitude je suis, comment dire très habile en vélo, je peux même traverser Shibuya sans poser pied à terre, ce qui est un exploit comparable a la conduite du millenium falcon dans un nuage d'astéroïdes par Han Solo.

Hier matin, je partais seul, sans Garance dans mon dos pour me dire allez courage papa!, et avalais sans problème la première côte. Puis j'arrivais pour quelques minutes de repos au feu des pompiers de la Yamate dori. Le feu est très long et j'avais DJ Shadow dans les oreilles. Il faisait beau et je repensais avec un peu de nostalgie à mon enfance et à mon BMX. Oui j'avais un BMX, il était beau et je me suis même cassé le bras avec, mais c'est une autre histoire. Et la, en attendant le feu, une idée absurde m'est venue, j'allais tenter un monoroue à l'arrêt, histoire de tenir l'équilibre avec le frein, à 9h du matin. J'ai très bien tenu l'équilibre pendant 17 secondes puis, au moment de la fin du morceau, j'ai perdu l'équilibre et été projeté en arrière. No problemo avec un vélo, je retombe sur mes pattes mais c'était sans compter sur le siège enfant....Première chute à la Pierre Richard. La honte absolue.

Petit tour de tête, ok personne dans la rue pour rigoler, je remonte en selle et met le pied droit sur le tout petit parapet de béton qui sépare la rue du trottoir. Je me met à penser à la possibilité, non pas d'une île, mais d'une camera de surveillance qui aurait immortalisé l'instant. Si c'était le cas, il était fortement probable qu'un petit malin l'ait diffusé sur le net et que je devienne un star mondial de la honte comme ce pauvre gamin qui imitait le méchant Dark Sidious de la Guerre des étoiles (autant l'appeler Sid Vicious tant qu'on y est), pensant être seul avec lui même et sa conscience à ce moment la.

Et la pour en rajouter une couche, mon pied droit glisse et je me vautre lamentablement sur le trottoir. Tout ceci à l'arrêt bien entendu. Que dire d'autres? que je me suis quand même fait super mal à la cheville... Peut-être rajouterais je qu'en continuant mon chemin j'ai voulu démêler les fils des écouteurs du mon ipod tout en continuant de rouler et que bien entendu ils se sont enroulés dans les rayons de la roue avant...

Pierre Richard, sors de mon corps. S’il te plait…

mercredi 22 mars 2006

le conducteur était une femme

Un homme de taille moyenne (170cm), de corpulence moyenne et d'un âge certain a disparu depuis le 30 Novembre 2005, entre 10h30 et 12h30 aux alentours du mont Takao. Ce brave homme (ou peut être, après tout n'était il pas du tout brave) était surement parti faire des photos de papillons avec un appareil photo très compliqué et très cher en bandoulière autour du cou. Les autorités pensent qu'il aura surement "dévissé", comme disent les grenoblois, et s'est probablement tordu l'échine contre un Sakura après avoir rebondi contre un roc en tentant de prendre en photo un papillon ou un singe. Le mont Takao cache probablement un macchabé quelquepart, à moins que les esprits de la forêt, tres nombreux avec leurs gros nez ne se soient deja occupés du corps du randonneur disparu.

C'est pour essayer de faire progresser l'énigme que nous avons décidé de nous rendre au mont Takao en compagnie de véritables hussards de l'alpinisme que sont nos amis E&G.

Le mont Takao est une bien belle montagne de pas loin de 600 metres. Ok j'entends deja les grenoblois et même certains auvergnats qui se marrent déja. 600 mètres d'altitude c'est beaucoup plus bas que la moindre petite motte de terre autour de Grenoble et même plus bas que la vénérable Loge des Gardes, bien connue des amateurs de pentes bien raides du coté de Clermont Ferrand.

Vous l'aurez compris, le mont Takao c'est pas pour les fillettes. Mais quand on a deux fillettes et que l'on veut quand même se le faire, on prends le cable car, et tenez vous bien, le conducteur du cable car était une femme.

La jolie ballade à l'air pur et sous le soleil de ce premier jour du printemps fut accompagnée de Soba, de glaces à la fraise, de japonais en tenue d'alpiniste avec un poste de radio collé à l'oreille (finale de la coupe du monde de baseball) et enfin de singes.


Et puisque E&G sont de très mauvais photographes, voici quelques photos de la journée spécialement pour leurs nombreux lecteurs égarés par ici.


Bon et puis on n'a pas trouvé de macchabé, tant pis on aurait bien aimé, mais ce sera peut être pour la prochaine fois si on a de la chance.

lundi 20 mars 2006

Une charogne sur le pas de la porte

Un petit restaurant dans le quartier de Gaienmae accueille ses visiteurs avec une charogne accrochée près de la porte d'entrée. Je ne sais pas très bien de quel animal il s'agit, mais ce qui est sur c'est que c'est une véritable nature morte en décomposition. Ca renarde, ça refoule et c'est pas vraiment très accueillant...

Il y a des gens qui aiment lire, même au Japon. Il y a aussi des gens qui lisent beaucoup et qui, du coup, le soir après plusieurs chapitres du dernier roman d'Alexandre Jardin ont mal au poignet à force de... tenir à bout de bras ce volumineux pavé. Pour ceux la, il existe dans ce beau pays un tout petit accessoire qui permet de s'ennivrer des oeuvres d'Alexandre Jardin jusqu'au bout de la nuit, sans plus jamais souffrir de l'engourdissement des métacarpes ou de la fameuse crampe du pouce.

Il est même possible, grâce à ce petit accessoire, pour les ambidextres ou les plus habiles de tenir son manuel d'Origami d'une main tout en pliant le papier de l'autre.
J'allais oublier de signaler, pour ceux qui n'aiment ni les origamis ni Alexandre Jardin, que ce petit accessoire en plastique bleu peut servir aussi pour soutenir de vrais livres.

Et avant d'aller au lit, une tisane et un mikado au fromage.

samedi 18 mars 2006

Le cerisier de Matsumura

Et voici le Sakura, le cerisier du Japon, de l'école de Garance. Il est en fleur.

De la difference dans les strategies d'orientation

Un étude très serieuse, parue dans le volume 119 de la revue Behavioral Neuroscience* prétend que les homosexuels lisent les cartes comme des femmes...Ce travail de haute qualité scientifique a été rondement mené par une équipe anglaise, et là pour une fois je n'y suis pour rien.

Que penser de cela ? Est ce une débauche d'homophobie mélée de machisme? Faut il croire la rigueur des méthodes de la neuroscience moderne allié à une confiance aveugle en la statistique ou se poser quelques questions?

La vie au Japon, peut nous amener quelques éléments de réponses puisque :
  1. Comme vous devez le savoir, au Japon il n'y a pas de nom de rue et trouver une adresse suivant la méthode des numéros de chome, de bloc et de maison peut se reveler un veritable problème. D'ou le recours très fréquent aux cartes ou au GPS si l'on est un chauffeur de taxi.
  2. Comme vous ne le savez surement pas, à par Hard Gay à la télé il n'y a pas de gays au Japon, du moins officiellement. Tout comme il n'y a pas de grippe aviaire, de maladie de la vache folle, de tremblante du mouton, de sirhose du dindon ou de gastro-entérite du Tanuki. Il n'y a pas non plus de Sida ni de corruption...

Alors comment fait le garçon pour trouver son chemin au Japon? il étudie longuement la carte, regarde la direction (le nord n'étant pratiquement jamais en haut de la carte, quelque soit la carte), il essaye de reperer le soleil, estime les distances, recoupe des informations, lis les numeros de blocs sur les murs et se represente dans sa petite tete les lignes de métro. En aucun cas, et la j'insiste, Jamais au grand JAMAIS il n'ira demander son chemin à un passant, de surcroit à un passant Japonais.


En corollaire, comment Madame fait elle pour trouver le chemin qui la mènera au magasin GAP tant convoité? Madame repère sur la carte l'emplacement de l'am/pm le plus proche de sa situation présente, s'y rends puis essaye de trouver du regard le Starbucks qui est censé se trouver à peu près non loin du GAP convoité puis en desespoir de cause demandera son chemin à une mémé-san dodécacentenaire ou à un représentant de la jeunesse marron**.

OK vous allez me dire, ca sent le vécu tout cela, mais que l'on me flagelle tout nu devant la gare de Shibuya si il n'y a quand meme pas une part de vrai dans tout cela.

Quant à savoir quelle technique les gays utilisent, alors la j'en sais rien et je m'en fout*** un peu pour tout vous dire.

*Q.Rahman, D. Andersson, E.Govier, A Specific Sexual Orientation-Related Difference in Navigation Strategy, in Behavioral Neuroscience. 2005 Feb Vol 119(1) 311-316.
**Pour ceux qui ne savent pas ce qu'est la jeunesse marron, il n'ont qu'a le demander.
***et que ceux qui n'aiment ni la mer, ni la montagne ni la campagne aillent se faire foutre.

mardi 14 mars 2006

Tranche de dimanche

J'ai acheté un chapeau dimanche, un chapeau de mère grand, un chapeau-cloche, un chapeau pour traverser le pont qui mène sur l'ile d'Enoshima, le Lourdes local. Le vent était tel que j'ai pensé que mes oreilles allaient se figer, geler puis tomber ensuite dans le silence le plus angoissant qui soit (et avec un petit ralentit dramatique).


J'ai pensé aussi que peut être mes filles allaient s'envoler comme des crêpes sans que nous n'ayons le temps de les plaquer au sol, ou encore, de façon plus réaliste, que l'une d'entre elle allait vouloir courir pour rattrapper un doudou, une casquette ou un trésor ramassé par terre et tomber dans la mer grise sous nos yeux horrifiés. Moi qui suis toujours d'une franchise un peu brute, j'ai dit aux filles "quand vous courez si près de l'eau j'ai peur de vous voir tomber car je ne sais pas si j'aurais le courage d'aller vous chercher".

Non c'est pas du chantage, c'est la vérite vraie. D'ailleur Benoit et moi on a débattu ensuite sur le fait que justement j'irais, oui, même avec ce froid, même avec mes oreilles froides et mon chapeau tout neuf, même avec mon 6 au bac en natation option plonger-chercher-le manequin-sans-membres-puis-rétro-pédaler-pour-le-ramener-au-bord. Et dire qu'à l'époque j'étais en tenue, entrainée, dans une eau claire calme et chaude...

Donc on a posé des bougie au bouddha du haut de la colline, en lui demandant de nous épargner le bouillon pour aujourd'hui ; j'ai failli être impressionnée par l'atmosphère zen, l'introspection et la pudeur ambiante, sauf que raté, j'ai vu les nombreux packs d'Ebisu sagement alignés dans le temple. Offrande parait-il...alors ensuite j'ai quitté mon oeil plein de piété pour ces moines et n'ai vu d'eux que ce magnifique pantalon turquoise porté à la négligé ; qui bouffe et plisse et accompagne à merveille le rythme des pas...ne voyant pas comment obtenir les infos nécessaires pour m'en procurer un, je me suis rabattue sur des mini tongs pour nos fillottes, parce que, et là je pense toujours à mon papa, pendant que Benoit admire le dragon, moi je trépigne sur le mode "magasins, magasins, magasins"...


Mais j'exagère un peu parce que j'ai bien apprécié les marches, et la fontaine du-dit dragon, les piécettes qu'on lance pour espérer gagner des souhaits, les grelots que l'on fait tinter du bout de la corde, la vue du sommet et l'arbre à voeux ; les ballons-moulins à vent des filles qui faisaient un bruit de mobylette quand ils marchaient à plein régime, la végétation d'estampes et les falaises abruptes.


La ballade s'est ponctuée de rencontres, celle de shibuyettes égarées, de mama-san touchantes en tabliers et de statues rouges et imposantes. Des minounes farouches, des touristes par dizaines, des mangeurs de poisson séché-écrasé qui empestaient la rue, des attendris de nos fillottes.
Puis le train retour a été une romance (de par son nom de romance car), et nous sommes rentrés chez nous abrutis de vents et repus de notre journée.


Personnellement je ne rajouterais à ce descriptif que deux mots :

fesses en cuir et arbre à couilles


Et pour Margot, une photo des pantalons des moines (de dos et de loin....désolé)


Et un moine pété de rire (on ne sait pas très bien pourquoi en fait...)

Art parietal

Alors que l'on rentrait à la maison, épuisés par une journée entière de trek urbain, nous sommes passés par le Parco. Le Parco étant un complexe de grands magasins de luxe à Shibuya. En marchant dans la petite rue qui débouche sur la plus grande rue, mon oeil de lynx est attiré par un jeune homme masqué (ok, rien de très original à Tokyo) en train de peindre sur le mur, et ça c'est peu courant...En fait ce monsieur était en train de peindre une publicité. Plutôt que de la coller à la vas-y-comme-je-te-pousse une affiche papier 4x3, ce jeune homme était tranquillement en train de reproduire une photo de pub avec force réalisme. Je vous laisse juger sur pièce.

Belle pièce hein! je lui trouve quand même un air un peu niais avec cette bouche ouverte.
Je trouve personnellement l'idée plutot sympathique. La visibilité de la pub est sûrement plus grande qu'une pauvre affiche, voir même qu'un écran super Jumbo comme il y en a tant dans ce coin de la terre. Et en plus cela fait travailler un peintre et quelque part valorise la performance manuelle. Imaginez le nombre d'emploi crées en France si l'on obligeait les publicités murales à etre peintes à la main... Plus un seul élève des Beaux arts au chômage, formation accélérée à la peinture chez manpower... Meme les typos et lettrages sont faits au pinceau.

Au passage une petite appli web assez drôle pour composer des tableaux de toute beauté, c'est chez Veer, et en plus on peut mettre des baleines.

On continue avec des images assez dures à supporter, il s'agit ici en effet d'un des premiers cas de maltraitance de robots quadripèdes. C'est chez l'excellent Wohba.


On monte?